Évocation de la comtesse Greffulhe au Palais Galliera

La Mode retrouvée, les robes trésors de la comtesse Greffulhe Palais Galliera - Mode d'Hier et d'Aujourd'hui

Comme je vous le disais en début de semaine, j’ai eu la chance d’être invitée jeudi dernier à l’inauguration de la nouvelle exposition du Palais Galliera « La Mode retrouvée  : Les robes trésors de la comtesse Greffulhe » qui est à l’affiche jusqu’au 20 mars 2016.

J’étais vraiment très très contente de recevoir mon carton d’invitation et j’avais hâte de la découvrir. Contrairement à certaines connaissances du milieu du costume qui n’avaient pas aimé l’exposition Jeanne Lanvin, j’avais trouvé au contraire qu’elle était efficace et j’y avais pris beaucoup de plaisir. Je suis un peu plus mitigée concernant cette exposition.

Exposition La Mode retrouvée de la comtesse Greffulhe au Palais Galliera
Vue de l’exposition (un peu floue)

Quand la comtesse prend vie

L’exposition s’attache à présenter pour la première fois au public une partie de la garde-robe extraordinaire de la comtesse Greffulhe que ses descendants ont donné au Palais Galliera. Personnage intriguant, la comtesse a été follement admirée en son temps par nombre de personnalités remarquables comme Marcel Proust ou Gabriel Fauré (qui lui a dédié le morceau Pavane) et l’exposition rend assez bien compte, à mon sens, du personnage qu’elle était. Les riches toilettes, les photographies, les documents d’archives (comme ce testament qu’elle a rédigé très tôt après la mort de sa mère), les extraits d’œuvres qu’elle a inspirées, tout ceci produit un portrait kaléidoscopique assez poétique de cette personnalité qui semblait vraiment hors du commun.

photographie comtesse Greffulhe
Paul Nadar, 1883
Portrait de la comtesse Greffulhe dans la robe de son arrière-grand-mère Mme Tallien
Papier albuminé collé sur carton (BNF)

Muse de Marcel Proust qui a créé le personnage de la Duchesse de Guermantes à son image dans À la recherche du temps perdu, la comtesse Greffulhe (dont je n’avais jamais entendu parler) semblait vraiment extraordinaire et c’est assez émouvant de la voir bouger dans ce morceau de film tourné sur son balcon qui est projeté dans l’exposition.

visite vers 1885 de la comtesse Greffulhe Galliera
Visite non griffée vers 1885
Sergé de soie beige brodé de fils de soie mastic, galon de passementerie à effilés en soie marron et jaune, glands en bois couverts de soie marron, beige , et jaune, cordonnet de soie marron et jaune, ruban cannelé. Doublure en sergé de soie vert kaki pâle

Pourtant il me semble que l’exposition passe un peu à côté de son propos. Dans le dossier de presse (dont je vous conseille la lecture ici), les goûts originaux voire excentriques de la comtesse en matière de mode sont beaucoup évoqués sans qu’il ne soit possible pour le visiteur moyen de comprendre en quoi. On nous dit que les robes de la comtesse Greffulhe sont comme les toiles qu’elle n’a pas peintes ou les musiques qu’elle n’a pas composées, mais ce processus de création est, je trouve, trop peu (ou trop maladroitement peut-être) mis en avant. Par ailleurs, il me semble assez peu efficace de ne montrer que des toilettes extraordinaires pour faire comprendre à un public non habitué qu’elles sont effectivement extraordinaires. Les expositions de mode étant assez largement tournées vers le luxe et les toilettes d’exception, je ne vois pas comment on pourrait avoir une idée juste de la mode d’une époque sans donner au moins une idée des coupes et des matières du quotidien. Pour que la comtesse puisse effectivement briller, il aurait fallu peut-être davantage la comparer à ses contemporaines (même si Proust estime qu’elle est incomparable puisqu’il n’existe personne d’autre comme elle).

manteau années 1920 de la comtesse Greffulhe
Vue de l’exposition.
Au fond manteau vers 1920 de Vitaldi Babani
mousseline de soie noire imprimée rouge, vert, et violine, et brochée de fils métallique or. Cordonnet en fils de soie noirs et fils métalliques or. Bouton en verre. Doublure en satin de soie mastic.

Pour moi le Palais Galliera ne nous offre pas ici une exposition de mode, mais l’évocation d’une personnalité. L’évocation fonctionne, la magie a opéré sur moi, mais le contenu est, lui, malheureusement absent.

manteau 1925 de la comtesse Greffulhe Palais Galliera
J’ai été très étonnée par la date de ce manteau :
Philippe et Gaston, vers 1925
Manteau
taffetas de soie noir, doublure en taffetas de soie beige.

Des robes dans la pénombre

Le gros point noir de l’exposition, souligné par toutes les personnes avec qui j’en ai discuté, est sans conteste l’éclairage. Les cartels des robes sont posés au sol ce qui oblige à se pencher très bas (et pourtant je suis petite) et de côté sous peine de faire de l’ombre. Le confort de lecture des cartels est donc très mauvais et les robes elles-mêmes sont assez mal éclairées : on peut tourner autour d’une robe de jour de 1887, mais le dos n’étant pas éclairé on ne voit pas grand chose. C’est dans la première salle que l’éclairage est le plus désagréable cependant, j’ai l’impression qu’il s’améliore un peu dans les salles suivantes.

Robe 1900 Beauchez de la comtesse Greffulhe
Beauchez, robe du soir, vers 1900
Velours de soie bleu nuit et marron, dentelle mécanique, mousseline de soie et tulle écrus, broderies de perles et paillettes.
Copyright : Julien Vidal / Galliera / Roger-Viollet
robe du soir 1900 de la comtesse Greffulhe au Palais Galliera
La même dans l’exposition
Détail de la robe Beauchez.
Détail de la robe Beauchez.

Je précise ici que j’ai visité l’exposition de nuit et que c’est peut-être un peu moins pénible de jour (raison pour laquelle j’aimerais y retourner un dimanche matin). Si vous vous rendez au Palais Galliera pour voir l’exposition, je vous conseille donc, dans le doute, de le faire en journée.

corsage 1880 comtesse Greffulhe
Corsage non griffé vers 1880-1885
dentelle de soie noire type Chantilly, tulle de soie noir, broderies de perles de verre noir imitant le jais
Corsage 1880 comtesse de Greffulhe dos
Dos du corsage

En définitive je suis assez partagée sur cette exposition, que j’ai trouvée poétique (j’ai vraiment eu plaisir à retrouver des extraits de la Recherche et de Pavane parce que ce sont deux œuvres très chères à mon cœur), mais qui me frustre un peu dans son contenu. Depuis la réouverture du Palais Galliera et les trois expositions que j’y ai vues (Les années 1950, Jeanne Lanvin et celle-ci) je commence à avoir envie d’un peu plus de dimension dans les expositions proposées par le musée, c’est-à-dire davantage de contenu scientifique et peut-être un peu moins de spectacle et de belles robes pour les belles robes. L’intérêt d’une exposition temporaire est, à mon sens, de donner à voir sous un jour nouveau et d’adopter un angle sinon inhabituel du moins qui questionne le visiteur. J’espère donc que ce désir sera entendu dans les expositions futures. 😉

 

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Voyage au musée de la mode d’Albi

Voyage au musée de la mode d'Albi

Lors de mon passage à Toulouse, j’avais très envie d’en profiter pour aller faire un tour à Albi, qui revêtait plusieurs intérêts pour moi : sa cathédrale, son musée Toulouse-Lautrec et son musée de la mode. Tout ça saupoudré d’une vieille ville mignonne comme tout, qui ne m’a pas déçue. Je vais me concentrer, dans cet article, sur le musée de la mode car le reste s’éloignerait un peu trop de l’objet de ce blog, mais je vous encourage tout de même vivement à aller visiter la cité épiscopale qui vaut le détour (elle est d’ailleurs classée au patrimoine mondiale de l’UNESCO depuis 2010 ou 2011).

Mais revenons à nos moutons et parlons du musée de la mode, initiative privée portée par la passion d’un collectionneur, Dominique Miraille, qui a réhabilité un ancien couvent au cœur de la vieille ville pour en faire un musée où exposer sa collection de vêtements allant du 18ème siècle aux années 1970.

pochette brodée sequins 1935, musée de la mode d'Albi
Pochette brodée, 1935

Une exposition de mode par an

Tous les ans, Dominique Miraille puise dans sa collection de vêtements anciens pour proposer une nouvelle exposition qui fait vivre le lieu. Cette année, l’exposition s’intitule « Noir sur Blanc, Noir et Blanc » et revêt deux aspects :

  • « Noir sur blanc » pour évoquer l’écriture, la littérature qui contient bon nombre de descriptions de toilettes.
  • « Noir et blanc », une sélection de vêtements en noir et blanc.

Les deux types de vitrines s’articulent assez bien dans l’espace, même si j’avoue que le côté « Noir et blanc » m’a paru un peu plus faible (non pas dans le choix des pièces, mais plutôt dans le discours qui était peu clair). En revanche l’aspect « Noir sur blanc » est, à mon sens, une vraie réussite. Chaque pièce exposée correspond à un passage de la littérature décrivant une toilette ou un élément de toilette. Pour certains extraits le vêtement associé est particulièrement bien choisi et je trouve que cette approche est vraiment très bien trouvée pour plaire au public le plus large. J’ai visité l’exposition avec un ami qui ne s’intéresse pas du tout au costume historique et qui a vraiment apprécié l’exposition et le point d’ancrage littéraire. Cela étant dit, quand on apprécie les costumes, le discours de l’exposition a assez peu d’importance tant les pièces sont belles.
vitrine exposition noir blanc musée de la mode d'Albi

chaussures 1895 1900 musée de la mode d'Albi
Chaussures vers 1895-1900
Satin noir. Haute languette brodée de perles de jais et de paillettes

Petits bijoux au musée de la mode d’Albi

Dominique Miraille a vraiment rassemblé des petits bijoux dans sa collection qui valent à eux seuls le déplacement. Les pièces sont évidemment d’époque, non restaurées et en excellent état. Il a d’ailleurs rassemblé des choses assez originales qu’on ne voit pas souvent. J’ai littéralement mitraillé l’exposition, mais comme il y fait assez sombre pour préserver les textiles, mes photos ne sont pas terribles. J’espère en tout cas qu’elles vous donneront envie d’y aller !

robe de bal 1845 musée de la mode d'Albi
Mon coup de cœur de l’exposition. Une robe de bal toute légère vers 1845
tenue de vélo 1890 musée de la mode d'Albi
Une tenue dont je n’ai pas photographié le cartel, mais qui est peut-être une tenue de vélo vers 1890 ?
Robe et couronne de mariée vers 1910 musée de la mode d'Albi
Robe et couronne de mariée vers 1910
robe de mariée 1910 musée de la mode d'Albi
Visuel de Dominique Miraille de la robe de mariée
robe 1890 musée de la mode d'Albi
Une robe vers 1890, je pense, mais dont je n’ai malheureusement pas photographié le cartel

robe 1890 musée de la mode d'Albi

Corsage de bal vers 1860, musée de la mode d'Albi
Corsage de bal vers 1860
Corsage de bal vers 1855 musée de la mode d'Albi
Corsage de bal vers 1855
Organdi brodé au plumetis
robe à tournure musée de la mode d'Albi
Robe à tournure dont je n’ai pas photographié le cartel
bottines matelassées 1880 musée de la mode d'Albi
Bottines vers 1880
Satin marron piqué et matelassé. Boutons et lacets assortis
visite 1885 musée de la mode d'Albi
Visite vers 1885
costume d'homme musée de la mode d'Albi
Costume d’homme (pas de photo du cartel)
robe pour le tennis 1920 musée de la mode d'Albi
Robe pour le tennis vers 1920.
Coton piqué
corsage 1900 musée de la mode d'Albi
Corsage vers 1900 (pas de photo du cartel)
robe vers 1845 musée de la mode d'Albi
Robe vers 1845.
Soie « gorge-de-pigeon ». Corsage rehaussé de boutons et passementerie de soie.
Châle en dentelle de Chantilly
costumes d'enfants vers 1900 musée de la mode d'Albi
Costume marin de petit garçon vers 1900 (coton piqué bleu et blanc, béret en coton bleu et pompon de laine) et robe de petite fille vers 1900 (broderie anglaise sur coton)
robe petite fille 1830 musée de la mode d'Albi
Robe de petite fille vers 1830.
Coton incrusté de bandes de tulle de soie
robe petite fille 1860 musée de la mode d'Albi
Robe de petite fille vers 1860.

Il y a beaucoup de photos, mais ce n’est qu’un petit aperçu de ce que vous pourrez voir dans l’exposition. Tous les dimanches, Dominique Miraille propose une visite accompagnée qui est, paraît-il, passionnante. Je n’ai, malheureusement pas pu la faire car nous sommes allés à Albi le samedi, mais j’ai eu l’occasion d’échanger quelques mots avec lui après ma visite et il est très sympathique. Il a d’ailleurs eu la gentillesse de m’offrir le catalogue de la première exposition du musée dans lequel les reproductions sont nombreuses et de bonne qualité. Bref, je ne peux que vous conseiller la visite si vous avez l’occasion de passer par Albi !

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Jeanne Lanvin au Palais Galliera

Exposition Jeanne Lanvin au Palais Galliera ©Pierre Antoine

Dimanche dernier je me suis levée assez tôt pour aller visiter l’exposition Jeanne Lanvin du Palais Galliera avant qu’il n’y ait trop de monde et je voulais vous en dire deux mots ici.

Malheureusement les photos étaient interdites, je dois donc me contenter des visuels de presse, qui, s’ils sont très beaux, ne s’intéressent pas aux même choses que moi. Je ne pourrai donc pas vous montrer ce qui m’a marquée.

Je dois vous avouer que je suis rarement sortie aussi enthousiaste d’une exposition de mode. L’amie avec laquelle j’y suis allée pourra en témoigner, je n’ai pas arrêté de dire en sortant de l’expo : « C’était beau ! Qu’est-ce que c’était beau ! », bref, une espèce de boucle d’émerveillement que je n’avais, je crois, jamais ressentie. Entendons-nous bien, des costumes et vêtements merveilleux dans des expositions j’en ai déjà vu pas mal, mais je ne sais pas, soit le nombre de pièces extraordinaires présentes dans celle-là était supérieur, soit d’habitude j’ai toujours pleins de critiques qui gâchent un peu l’ensemble, bref pour moi l’exposition Jeanne Lanvin est une réussite.

vue de l'exposition Jeanne Lanvin au Palais Galliera ©Pierre Antoine
Je n’ai pas retrouvé la référence de ce modèle qui date des années 1920. Au fond à droite, la robe avec la ceinture rouge est la robe « Boulogne » datée de l’été 1920, celle d’à côté est peut-être de la même collection
©Pierre Antoine

Une scénographie qui incite à la déambulation

Je suis rarement emballée par les scénographies « spectacles » des expositions (c’est-à-dire qui se remarquent), pourtant j’ai trouvé la scénographie de cette expo vraiment très réussie. Je précise ici que j’ai vu l’exposition à un moment de faible affluence (il y avait un peu de monde, mais pas trop non plus), mais je pense qu’en cas de forte affluence l’expérience de visite risque d’être un peu gâchée, non seulement par l’exiguïté des espaces de Galliera, qui sont ce qu’ils sont, mais aussi par l’abondance de pièces exposées et donc le manque de fluidité du parcours.

Ce que j’ai trouvé génial dans cette scénographie (oui, carrément, j’emploie le terme génial, une fois n’est pas coutume, j’ai aimé cette exposition) c’est qu’elle permet une déambulation très libre. J’ai un peu de mal à suivre un parcours clair au Palais Galliera et j’ai souvent tendance à ne pas trop savoir dans quel sens aller, ce qui est lié à la disposition des salles, mais ici cela n’a aucune importance. On peut voir la fin avant le milieu, tout est suffisamment cohérent pour s’y retrouver. Il s’agit d’une monographie, mais le parcours n’est pas chronologique. Le découpage est thématique, mais pour autant pas tranché, ce qui permet d’aller d’une pièce à l’autre de revenir sur ses pas et de tomber en extase devant les robes de Jeanne Lanvin (oui, en extase).

Robes noires fin des années 1920 expo Jeanne Lanvin au Palais Galliera ©Pierre Antoine
De très belles robes noires en début de parcours. Je n’ai là encore pas retrouvé les infos du cartel. De mémoire je crois que ça tournait autour de 1927-29, mais je n’en suis plus sûre.
©Pierre Antoine

Mode, modernité, intemporalité

C’est peut-être parce que le début du XXe siècle dans les milieux d’avant-garde me fascine, mais tous les vêtements exposés m’ont parlé. Ce n’était pas seulement très beau et fin, c’était des choses que j’aurais voulu porter maintenant tout de suite (enfin, si je paradais au Festival de Cannes par exemple). Les créations de Jeanne Lanvin sont extraordinaires parce qu’à la fois elles s’inscrivent, stylistiquement, de manière assez forte dans leur époque (mon dieu tous ces sweaters aux dessins géométriques étaient tellement parfaits) et à la fois elles sont intemporelles et pourraient être portées aisément aujourd’hui (dans un certain contexte, on est d’accord, je n’assumerais probablement pas le manteau en lamé doré tous les jours).

Là où l’exposition est vraiment passionnante (pour moi en tout cas) c’est qu’elle montre des carnets d’échantillons brodés de la griffe, qui sont de petits bijoux. Hélas ils n’ont pas été choisis pour les visuels de presse, je ne peux donc pas vous les montrer, mais je vous encourage vivement à courir au musée pour les voir en vrai. J’ai aussi trouvé les cartels très bien faits et notamment la précision, quand la tenue avait été commandée par une cliente, que cette dernière avait fait changer la couleur d’origine du modèle. Cela montre aussi que la mode c’est quelque chose qui se porte et que le goût des clientes et des clients l’influence au même titre que les créateurs.

corsage 1900 ou 1910 à l'exposition Jeanne Lanvin au Palais Galliera ©Pierre Antoine
Je n’ai plus les infos du cartel en tête pour ce corsage, mais il doit tourner autour de 1910.
©Pierre Antoine

La disposition des vitrines (une alternance entre vêtements mannequinés et « jetés négligemment » dans des boîtes en miroir) permet de voir les vêtements d’assez près, j’ai donc pu remarquer que l’une des fameuses robes de style était montée avec des plis canons à l’extérieur sur les hanches pour jouer avec le volume et la géométrie (là encore, hélas, pas de photos).

manteau Jeanne Lanvin 1937 Palais Galliera ©Pierre Antoine
Manteau de 1937 (celui de l’affiche si je ne me trompe pas)
©Pierre Antoine
dos d'un manteau de 1937 Jeanne Lanvin au Palais Galliera ©Pierre Antoine
La merveille du dos.
©Pierre Antoine

En fait je ne peux pas tout vous énumérer tant chaque pièce est une merveille de détails : les broderies sont fabuleuses, les couleurs aussi (ce vert absinthe !), le travail de coupe et de plissés est renversant. À chaque robe je me disais : « je veux la même. Je veux savoir faire cette merveille ». Si vous avez des préjugés contre la mode des années 1920, cette exposition les balayera immédiatement. Bref, je vais interrompre là mon lyrisme et vous conseiller d’y aller sur le champ si vous en avez la possibilité (l’exposition court jusqu’au 23 août). Une petite info en passant : le palais Galliera est un musée de la Ville de Paris, par conséquent en vous procurant la carte Paris Musées (de 20 à 40 €) vous pourrez entrer gratuitement dans l’exposition (ainsi qu’à celles du Petit Palais, du musée d’art moderne, du musée Carnavalet et de beaucoup d’autres). Autant vous dire que le prix de la carte est vite remboursé en allant voir 4 ou 5 expositions temporaires de la ville de Paris sur un an.

C’est tout pour cette critique dithyrambique (franchement les expositions dont je sors ravie se comptent sur les doigts d’une main), n’hésitez pas à me dire en commentaires ce que vous en avez pensé. Bonne fin de semaine à toutes et tous !

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Expo de costumes à Pierrefonds

Exposition Armures, hennins et crinolines au château de Pierrefonds

Comme vous l’avez peut-être appris sur Facebook, j’étais hier au château de Pierrefonds pour l’inauguration de l’expostion « Armures, hennins et crinolines » organisée par le Centre des Monuments Nationaux. Anne Lambert de Cursay m’a en effet invitée à participer au voyage de presse organisé par le CMN en compagnie de journalistes et blogueurs culturels, et je la remercie encore pour cette invitation. C’était une grande première pour moi et inutile de vous dire que j’étais ravie de cette opportunité, d’autant que je n’étais encore jamais allée à Pierrefonds.

Je dois vous avouer que j’étais un peu méfiante, initialement, à l’égard de cette exposition. Le mélange des armures, des hennins et des crinolines me semblait en effet un peu hasardeux et je ne voyais pas tellement à quel propos cela pouvait nous mener. Le principe de cette exposition, imaginée par Martine Kahane et Noëlle Giret, était de faire un parallèle entre le château, intégralement restauré par Viollet-le-Duc, où se sont tenus des pièces de théâtre amateur jouées par l’entourage de Napoléon III, et des costumes de scènes prêtés entre autres par le Centre National du Costume de Scène à Moulins.

costumes Le Roi d'Ys expo Pierrefonds
Costumes pour Le Roi d’Ys. Opéra d’Edouard Lalo, théâtre du Capitole de Toulouse, 5 octobre 2007.
Costumes : Franca Squarciapino.
costumes pour le roi d'ys
Le dos du manteau pour Le Roi d’Ys.
Il faut avouer que ce manteau a plutôt de la gueule.

Comme vous le savez sans doute, Eugène Viollet-le-Duc est connu pour ses interventions idéalisées sur l’architecture médiévale (qui font frémir aujourd’hui les archéologues et restaurateurs des monuments historiques). Homme du XIXe, il veut transmettre à ses contemporains une image d’un monde médiéval fantasmé, et le Château de Pierrefonds en est un exemple frappant. Napoléon III va en effet charger Viollet-le-Duc de la restauration (même de la reconstruction) du château en ruines et Pierrefonds est un mélange d’esthétique médiévale revue à la sauce XIXe. C’est sur cette idée qu’à Pierrefonds tout est faux tout en ayant l’air vrai, que sont parties les deux commissaires de l’exposition voyant là un point commun avec le costume de scène.

costumes Till Eulenspiegel expo Pierrefonds
Costumes pour Till Eulenspiegel, ballet de Vaslav Nijinsky. Opéra National de Paris, 9 février 1994.
Décor et costumes : Robert Edmond Jones.

Des contraintes de conservation qui imposent des choix

L’exposition a le mérite d’être très accessible. Cela faisait d’ailleurs partie du cahier des charges établi par le CMN : l’exposition devait être conçue pour le grand public et surtout les familles. Les costumes de scène choisis sont spectaculaires et animent bien les espaces.

Pourtant je suis assez mitigée sur le choix de ces costumes. Premièrement (c’est malheureusement lié aux contraintes de conservation au Château de Pierrefonds) presque tous les costumes exposés sont récents. À l’exception d’un costume pour Le Poirier de Misère de 1927, les dates de réalisation des costumes prêtés oscillent entre 1944 et 2007. C’est particulièrement dommage dans la mesure où la majorité des panneaux explicatifs font référence au 2nd Empire et notamment aux scènes jouées par l’entourage de la famille impériale en visite à Compiègne.

costume le poirier de misère expo pierrefonds
Non vous ne rêvez pas, les coutures ne sont pas en face. 😉
Costume pour le Poirier de Misère, opéra de Marcel Delannoy, Opéra-comique 1927.
Costumes : Marcel Multzer.

Deuxièmement le choix des armures, hennins et crinolines est, somme toute, assez arbitraire et peut convaincant. Si l’on peut admettre le point de vue des commissaires sur les liens entre hennins et crinolines (deux vêtements contraignants et s’étant exagérément développés malgré les critiques) je ne vois pas très bien ce que viennent faire dans ce parcours des crinolines de scène, qui n’ont rien à voir avec un imaginaire médiéval fantasmé dont il est question à Pierrefonds (à l’inverse des armures et des hennins) et surtout dans une dernière salle qui évoque de manière très simple et intéressante les villégiatures à Compiègne sous Napoléon III. Je sais bien que les contraintes liées à la conservation des costumes (ainsi qu’à la rareté des costumes de scène datant du Second Empire) sont importantes, mais je pense qu’il aurait été possible de faire des choix un peu plus pertinents.

costume Roméo et Juliette expo Pierrefonds
Costume pour Roméo et Juliette, ballet de Serge Prokoviev, Opéra national de Paris, 1967.
Décors et costumes : Michel le Corre

Une exposition qui ouvre des perspectives

Pourtant j’ai trouvé la dernière partie de l’exposition, consacrée aux habitudes de villégiature de la famille impériale à Compiègne et par extension à Pierrefonds, particulièrement réussie. Les commissaires ont, là, su très bien allier contenu scientifique à un propos grand public par le biais de panneaux simples, clairs et ludiques. C’est, à mon sens, l’élément le plus réussi de l’exposition, même s’il m’a laissée sur ma faim. Il me semble qu’il y aurait là, en effet, matière à faire une exposition très riche avec des vêtements d’époque (ou des recréations) approfondissant le sujet des visites de Napoléon III et Eugénie à Pierrefonds.

liste des bagages voyage à Compiègne expo Pierrefonds
L’un des panneaux de la salle des Preuses sur les villégiatures à Compiègne. Notez que dans le catalogue il est indiqué que ces visites duraient une semaine. Moi je trouve ça raisonnable. :P
caricature La vie parisienne expo Pierrefonds
Caricature de La vie Parisienne (10 décembre 1864) évoquant la tenue de villégiature idéale à Compiègne.
décor cheminée salle des Preuses Château de Pierrefonds
Décor de la salle des Preuses. Si j’ai bien compris le panneau, Viollet-le-Duc s’est inspiré du portrait d’Eugénie et de ses dames de compagnie pour ces sculptures.

Parce que le point fort de cette exposition c’est quand même la découverte d’un lieu passionnant (dont certaines salles qui n’avaient encore jamais été ouvertes au public), et qui mérite vraiment le détour. Les décors de Viollet-le-Duc sont superbes et les autres expositions du château valent le coup d’oeil. Par ailleurs la balade dans la ville de Pierrefonds est agréable, surtout quand il fait le temps que l’on a eu hier. Bref, je ne peux que vous inciter à faire le voyage !

Château de Pierrefonds
Un château qui a de la gueule.
plafond du Salon de réception château de Pierrefonds Viollet-le-Duc
Décor réalisé par Viollet-le-Duc.
Oui, en doré sur fond bleu ce sont des porcs-épics.
décor château de Pierrefonds Viollet-le-Duc
Encore des décors fabuleux
plafond de Viollet-le-Duc château de Pierrefonds
Je suis tombée en amour de ce plafond.
Pierrefonds
Un cadre champêtre plutôt sympa

Et vous, vous êtes déjà allé à Pierrefonds ? Vous connaissez le château ?

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[EXPO MODE] Déboutonner la mode aux Arts Décoratifs

habit 18e brodé en pièces, musée des Arts Décoratifs

Profitant d’un rendez-vous au musée des Arts Décoratifs jeudi dernier, j’ai visité l’exposition « Déboutonner la mode » (jusqu’au 19 juillet 2015) dont j’avais entendu du bien. Vous vous souvenez peut-être de ma critique de l’expo « L’impressionnisme et la mode » et du fait que je suis assez difficile à satisfaire en termes d’expositions, que ce soit de mode ou d’autre chose, et celle-ci ne fait pas exception.

L’expo des Arts Décoratifs a en effet des qualités (surtout sur la première partie jusqu’aux années 1910), mais elle ne m’a pas complètement satisfaite. Précisons que je l’ai visitée dans des conditions un peu bruyantes (il y avait un groupe en même temps que moi dans la salle) ce qui n’aide pas vraiment à se concentrer et à apprécier la problématique et la façon dont elle est mise en place. Néanmoins il y a de très très belles pièces (notamment ce fabuleux jupon XVIIIe brodé du Kyoto Costume Institute – malheureusement pas trouvé sur le site – et des pièces d’habits à la française brodées, mais pas encore montées) et des boutons divers très très beaux et originaux.

habit 18e brodé en pièces, musée des Arts Décoratifs
Habit 18e en pièces. Les boutons sont brodés par le brodeur en même temps que le reste de l’habit avant de le tailler.
habit 18e brodé en pièces, musée des Arts Décoratifs
Habit 18e en pièces. Les boutons sont brodés par le brodeur en même temps que le reste de l’habit avant de le tailler.

Malgré la circulation toujours un peu confuse dans les espaces d’expositions temporaires du musée des Arts Décoratifs, le parcours est à la fois chronologique et thématique et met en lumière la diversité des boutons en termes de matériaux, d’artisanat et de décorations. Cette grande variété et les différentes modes de boutons du XVIIIe au XXe siècles sont vraiment intéressantes et la première partie de l’exposition est à la fois foisonnante et claire dans son discours.

gilet homme 1880-1900
Gilet, 1880-1900.
(désolée pour le manque de précisions de la légende, mais ma photo du cartel est complètement floue) :-/
gilet d'homme 19e siècle
Gilet d’homme, démarcation des tissus.
gilet mode homme 19e siècle
En haut gilet à col châle, en bas gilet.
gilet homme col châle
Gilet à col châle, (date illisible sur ma photo)

Une analyse de la société par le vêtement encore trop peu présente

Les pièces exposées commencent, il me semble au XVIIIe siècle (je me trompe peut-être) et se concentrent sur les vêtements très riches (le bouton étant un accessoire luxueux). J’ai trouvé un peu dommage de ne pas montrer l’alternative aux boutons sur les vêtements populaires surtout que c’est aujourd’hui pour nous difficile d’imaginer ce qui pouvait remplacer les boutons sur des vêtements.

robe de mariée 1882
Robe de mariée, 1882, Les Arts Décoratifs, collection UFAC
robe de mariée 1882
Détail de l’ourlet, Robe de mariée, 1882, Les Arts Décoratifs, collection UFAC
caches-corset 1880
Deux cache-corset 1880.
Cache-corset et pantalon 1880
Cache-corset et pantalon 1880
robe d'après-midi 1870
Robe d’après-midi en trois parties vers 1870
bottines 1900
Bottines 1900 (ou 1880, j’ai un doute) et tire-boutons
robe de courses 1913
Photographie modèle de Dukes, Studio Talbot, 1913.
Costume pour les courses, Les Arts Décoratifs >> inspiration pour reprendre ma tenue 1914

La deuxième partie de l’exposition (à partir des années 1950 surtout) m’a beaucoup déçue (malgré quelques très belles pièces) parce qu’elle délaisse totalement la dimension sociale du vêtement par le bouton pour se concentrer sur l’utilisation des boutons dans la Haute Couture. Comme souvent les expos de mode post deuxième guerre mondiale se concentrent exclusivement sur les maisons de luxe en oubliant totalement le vêtement quotidien et en l’occurrence l’utilisation du bouton dans ce vêtement. La deuxième partie de l’expo, que j’ai trouvée assez inutile pour le propos général, est simplement un prétexte pour montrer des belles robes, ce qui n’est pas déplaisant, mais un peu agaçant. Je rêve de plus en plus d’une exposition de mode de la deuxième moitié du XXe siècle s’attachant à l’habillement quotidien et à ses implications sociales (je ne dis pas qu’il n’y en a pas, mais je n’ai pas vraiment le souvenir d’en avoir vu). De plus, à partir de la fin du XIXe siècle l’exposition oublie un peu le vêtement masculin, qui pourtant n’a jamais cessé d’utiliser des boutons.

Boutons patriotiques arts décoratifs
Boutons patriotiques vers 1944.
robe 1944 Libération Paris
Robe cousue et portée pour la Libération en 1944.

Par ailleurs la toute dernière partie consacrée aux boutons d’artistes m’a un peu laissée sur ma faim. Bref je suis un peu mitigée sur cette exposition. Contente de l’avoir vue, contente d’avoir appris des choses (les boutons illustrés au XVIIIe siècle sont absolument passionnants), mais un peu déçue du traitement qui a été fait de la deuxième moitié du XXe siècle. Je vous conseille néanmoins d’aller la voir si vous en avez l’occasion. Il y a de très belles choses et elle n’est pas dénuée d’intérêt. Notez que, comme toujours pour les expos de mode aux Arts Décoratifs, il y fait très sombre. Une nécessité pour protéger les tissus très sensibles à la lumière, mais peut-être faudrait-il en informer les visiteurs, qui ne peuvent pas le deviner.

Robe Dior années 1950
Robe Dior années 1950
Robe Dior 2013
Robe Dior 2013
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