Bonjour tout le monde ! Me revoilà cette semaine pour vous faire (re)découvrir le travail de Marion, dont je vous ai déjà beaucoup parlé sur ce blog, car elle fait partie des blogueuses vers qui je me tourne quand je me pose des questions techniques sur le costume historique. Or, Marion n’est pas seulement blogueuse, elle est aussi couturière sur-mesure spécialisée dans la création de robes de mariée et c’est cette activité que j’avais envie de mettre à l’honneur dans ce portrait.
Peux-tu te présenter un peu ainsi que ton parcours professionnel ?
Je suis Marion Brégier, la créatrice derrière Green Martha. Je suis couturière sur mesure, spécialisée dans la création de robes de mariée « alternatives », atypiques, romantiques, souvent colorées,
Ma formation d’origine n’a rien à voir avec la couture ni avec la créativité, mais j’ai toujours fait des choses de mes dix doigts à côté – dessin, couture, estampe… J’ai suivi une formation en couture floue avant de me professionnaliser, ceci dit, et je continue à me former en permanence.
Qu’est-ce qui t’as amenée à vouloir faire de la couture ton métier ?
L’enchaînement des événements, et la passion ! J’ai commencé par des déguisements et des costumes pour des GN (jeux de rôle grandeur nature) dans un cadre historique. C’est comme ça que j’ai mis le doigt dans l’engrenage ! Au début je cousais ce dont j’avais besoin pour un GN ou une convention, puis j’ai commencé à faire des recherches en Histoire du Costume, et à faire des robes victoriennes pour le plaisir. J’avais des demandes de proches pour des vêtements sur-mesure, et j’ai découvert que ça me plaisait de créer quelque chose selon leur cahier des charges. J’ai toujours aimé travailler avec un cadre créatif précis, le sur-mesure est idéal pour moi !
Quand je me suis mise à mon compte en 2014, j’ai beaucoup hésité entre les arts graphiques et la couture, mais la couture a finalement gagné – et je dessine plus pour mon plaisir à présent !
Récemment tu as mis l’accent, sur ton blog, sur ton métier de créatrice mariage, qu’est-ce qui t’a amenée à vouloir développer cette activité ? Est-ce que tu réalises toujours en parallèle des costumes historiques (pour toi ou pour des clients) ?
J’ai fait mes premières armes sur des collections de prêt-à-porter et d’accessoires pour tous les jours, mais je me trouvais vite limitée dans ce que je créais, et je ne me sentais pas dans mon rôle dans le travail de promotion et de distribution. J’ai fait les marchés artisanaux, l’ambiance est fantastique mais c’est épuisant quand on les enchaîne chaque week-end, et je ne voyais plus ma famille !
En parallèle, je voulais continuer à proposer des vêtements sur-mesure, mais je n’avais pas un instant à consacrer à développer un portfolio. Au printemps 2015 j’ai eu un gros creux dans mes ventes de prêt-à-porter et accessoires, le moment était venu de faire un choix : c’était le mariage qui m’attirait le plus. C’était là que je pouvais travailler à sublimer mes clientes, en créant des tenues juste pour elles.
J’aime toujours autant le costume historique, j’en fais toujours sur commande – et aussi pour moi en ce moment. Je poursuis mes recherches sur la mode des années 1893-1898, notamment, et j’ai d’autres projets de recherche et reconstitution de vêtements anciens prévus cette année.
J’aime aussi beaucoup réutiliser des éléments historiques dans mes créations modernes – corsets, jupons, corps à baleines… Je passe beaucoup de temps à chercher chaque semaine des modèles de robes de mariée anciennes pour les présenter sur mon blog et faire rêver mes lecteurs et lectrices.
Je crois savoir que tu crées des collections de robes de mariées, mais tu travailles également en total sur-mesure avec tes clientes en fonction de leurs goûts, quelle est la proportion de l’un et l’autre dans ton activité ?
Je travaille essentiellement en sur-mesure, avec des commandes très diverses, de la robe de cocktail pour la maman du marié à des vêtements techniques de randonnée !
Les robes de mariée de la collection sont des modèles que je peux proposer à un prix un peu plus doux, vu que les recherches de patron ont déjà été faites et qu’il ne s’agit plus que de mettre aux mesures de la cliente. Ces robes me servent aussi de vitrine à présenter sur les salons et sur mon site web.
En ce moment je prépare une collection capsule de six robes de mariée alternatives, qui seront présentées au mois de mai. C’est une occasion pour moi de montrer mes robes sur des femmes de tous âges et de morphologies très diverses – loin de la taille mannequin, on voit mieux les avantages du sur-mesure ! J’en profite aussi pour présenter un échantillon de techniques et de silhouettes.
Quelles sont tes inspirations pour la création de robes de mariées ?
Je suis très visuelle, une collectionneuse d’images compulsives – je peux passer des heures sur Pinterest, j’ai des étagères pleines de livres sur le costume historique et de livres d’art, et je collectionne les reliures annuelles de magazines de mode de 1860 à 1930.
J’aime avoir un point de départ précis, un thème et des limites pour chaque création. Quand je travaille avec une cliente, c’est elle qui va les fournir. Pour les robes de la collection, ça peut être un thème (pour la collection 2016, nous sommes un groupe de trois créatrices à travailler sur le thème des Méchantes de contes de fée), un tableau, un bout de dentelle, une modèle avec qui j’ai envie de travailler, un coucher de soleil… J’ai par exemple un projet de collaboration avec une créatrice qui fait des oiseaux en fil de fer, ses réalisations me donnent plein d’idées de robe(s) assortie(s) !
Les robes de mariées qu’on trouve dans les grandes enseignes sont souvent assez chères et dans des tissus synthétiques, par rapport à cela dans quelle gamme de prix se situe une robe de mariée sur-mesure ?
Je ne vais pas dire que je suis au même prix que Tati Mariage ou les robes importées directement de Chine sur eBay, mais les prix en sur-mesure sont comparables à ceux des grandes enseignes du mariage. Je m’adapte au budget de mes clientes, avec des robes très simples qui commencent autour de 800 euros pour les budgets serrés. Mon cœur de gamme est autour de 1500-2000 euros.
J’adorerais ne travailler que la soie et la dentelle de Calais, mais je sais qu’elles ne sont pas dans les moyens de toutes mes clientes. Et avec ce que subissent les robes d’exposition entre les défilés sur les salons, le maquillage et les photoshoots, je préfère pouvoir les passer à la machine sans peur ! J’ai passé longtemps à sélectionner des fournisseurs qui me proposent de vraiment beaux tissus, en synthétique comme en soie.
Est-ce que tu travailles uniquement avec des client(e)s de la région de Grenoble ou bien on peut te passer commande de n’importe où ?
Mon atelier est en bordure de Grenoble mais j’ai déjà travaillé pour des clients hors de Rhône-Alpes, même en région parisienne ! C’est un peu plus long, il faut prévoir des envois par la Poste, beaucoup de discussions au téléphone ou en ligne, et je préfère avoir au moins un essayage en chair et en os. Mais en général on s’en sort très bien !
Concrètement comment se passe la création d’une robe de mariée ou d’un costume/vêtement depuis le premier contact jusqu’à la livraison ? Tu peux nous décrire les étapes ?
La discussion commence souvent par un premier contact en ligne ou par téléphone, les gens viennent me voir parce qu’ils ont une idée précise mais ne la trouvent pas en magasin. Le premier rendez-vous sert à bien discuter de la tenue dans les détails, de façon à ce que je puisse proposer un devis précis – parfois plusieurs, quand nous hésitons entre plusieurs options.
La cliente verse un acompte avant le début du travail – en général autour du tiers du montant total, pour couvrir les matières premières et le début du travail. Il y a ensuite un rendez-vous de prise de mesures, et plusieurs essayages de toiles, qui sont des brouillons de la tenue dans un tissu de moindre valeur.
Quand la toile est parfaitement ajustée et validée par la cliente, je passe à la réalisation du vêtement lui-même. Il y a en général un dernier essayage pour vérifier les détails, marquer l’ourlet, etc. J’essaie de livrer mes robes trois semaines avant le jour J, pour que la future mariée soit libérée de ce souci pendant la dernière ligne droite. Et puis cela laisse un peu de délai s’il y a un empêchement ou une retouche de dernière minute !
Quelle étape te plaît le plus dans ce métier ?
C’est difficile de choisir, je fais tellement de choses différentes ! De la recherche documentaire, du conseil en image, de la géométrie, de la manipulation de tissu… J’aime particulièrement les moments où je reviens à l’atelier avec un rouleau de tissu tout neuf, surtout si c’est un brocard ou un taffetas de soie. Souvent je garde les derniers arrivés à portée de main pour profiter de leurs couleurs et de leurs textures, chaque fois que je passe à côté.
Y a-t-il une commande que tu as particulièrement aimé réaliser ? C’était quoi ?
Paradoxalement, c’est une commande qui n’a rien à voir avec le mariage : deux adeptes de la randonnée qui m’ont commandé chacun un coupe-vent et un sur-pantalon en coton hydrophobe. C’était un vrai challenge, il fallait penser à chaque détail pour adapter le vêtement à leur usage, réfléchir aux zones d’usure et à comment les pièces pourraient être réparées ou changées dans le futur. J’ai bien galéré par moments, et certains aspects ont été un véritable casse-tête, mais j’ai énormément appris en réalisant ces vêtements, et le résultat final est vraiment calibré au centimètre près pour eux.
Pour finir, la question spéciale « Mode d’Hier et d’Aujourd’hui » : quel est le vêtement à plis qui t’inspire le plus pour une robe de mariée ?
J’ai justement un quelque chose avec des plis intéressants en cours à l’atelier – ça devrait arriver bientôt sur mon blog, alors motus !
L’une des robes les plus extraordinaires avec des plis, pour moi, c’est la « Butterfly » de Charles James. C’est un véritable tour de force de tulle et taffetas qui pèse plus de 8 kilos ! C’est une véritable sculpture, une œuvre d’art à porter.
Vous pouvez retrouver le travail de Marion sur son blog et sur sa page facebook. Quant à moi je vous dis à la semaine prochaine et souvenez-vous, ce week-end je couds ! (j’espère 😉 )
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